Impostures, Romain Dutreix, éditions Fluide glacial, 56 pages, 14 euros.
La BD, c’est bien joli, mais c’est quand même cher et ça devient vite encombrant. Surtout en période de crise. Heureusement, Romain Dutreix, de chez Fluide glacial, s’est dévoué pour trouver “la” solution pour qui aime la bande dessinée franco-belge. Plutôt que d’acheter des dizaines d’albums, c’est dans un “souci d’économie et de pragmatisme” que l’auteur d‘Allegretto Deprimoso a réuni “les personnages les plus emblématiques de cet art mineur et populaire dans un seul ouvrage pratique, ludique et à la portée de toutes les bourses“.
Certes, ceux-ci connaissent quelques distorsions par rapport aux oeuvres originelles : Astérix et Obélix deviennent des indiens cannibales confrontés aux missionnaires de l’inquisition, Spirou et Fantasio connaissent l’angoisse du changement de dessinateur (surtout quand celui-ci est le fils de la concierge), l’agent 212 reprend du service sous forme de Robocop, Boule et Bill subissent les affres de l’adolescence et du déclassement social, un schtroumpf se retrouve au milieu d’un drame à la Bergman (et en noir et blanc), Lucky Luke doit prouver qu’il n’est pas fou, Blake et Mortimer peinent à trouver des repreneurs pour leur univers, etc. Et Titeuf se retrouve transposé, comme le fil rouge de l’album, de pays en pays pour y vivre des péripéties de plus en plus trash (avec les cartels de la drogue en Colombie, la pédophilie en Thaïlande, l’ubuesque dictature de Corée du Nord…).
L’art de la parodie n’est pas un genre facile et reste marginal (dans les années 80, le Grenoblois moustachu Roger Brunel s’en était fait une spécialité avant d’en faire un commerce, dans le registre légèrement coquin et Larcenet s’était centré sur la télé dans sa Loi des séries). Dutreix ici ne verse pas dans le pastiche (sauf pour sa création d’un super-héros du milieu du XIXe siècle), mais récupère ces héros mythiques pour les traiter à sa sauce… plutôt épicée. Et dans un style graphique unique et bien personnel. Si quelques unes de ces histoires auraient mérité d’être plus courtes et si certaines fonctionnent forcément mieux que d’autres, le running gag de Titeuf apporte la personnalité et donne le ton de ce drôle d’album. Irrévérencieux mais jamais vulgaire. Et au final, bien drôle.







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