De Gaulle, tome 3/3, Mathieu Gabella (scénario), Christophe Regnault et Michael Malatini (dessin), Frédérique Neau-Dufour (dossier historique). Editions Glénat, 56 pages, 14,50 euros.
Charles de Gaulle est décédé le 9 novembre 1970. Mais il avait déjà été une première fois mort, politiquement, après guerre, quand le Grand homme de la libération avait dû s’effacer “devant les partis” de la IVe République naissante. Et si son retour au pouvoir, en 1958 le vit encore reprendre la place du sauveur, si la fondation de la Ve République puis l’inscription de l’élection du Président au suffrage universel – tout autant que la fin de la Guerre d’Algérie – marquèrent durablement l’histoire de la France, c’est une histoire moins épique, forcément que la précédente, qui se raconte dans ce troisième et dernier épisode de cette grande biographie illustrée.
De la guerre d’Algérie au retrait de la vie politique en 1969, après l’échec du référendum, c’est un de Gaulle à la fois présent sur le plan intérieur mais aussi extérieur, à travers sa volonté d’un non-alignement entre l’URSS et les Etats-Uni, qui s’affiche.
Les auteurs avouent volontiers – dans le “making-of” qui conclue le dossier historique en fin d’album – avoir perçu ce troisième volet comme une “montagne imprenable”. Comment relater 25 ans de parcours politique et personnel de Charles de Gaulle, avec toute sa complexité en 46 pages ?
S’il met en avant certains épisodes – comme le retour au pouvoir en mai-juin 1958 – et s’il choisit, d’une manière originale, de débuter le récit par la grande manifestation des mineurs de 1963 (annonciatrice, sur le plan social, du Mai 68 à venir), le scénario ne peut totalement éviter le côté catalogue.
Bien plus que dans les deux précédents volumes, ce tome 3 multiplie donc les courtes séquences, juxtaposant les événements, en s’efforçant néanmoins d’être le plus honnête et complet possible. C’est ainsi que, globalement, rien n’est oublié, de l’assassinat de Ben Barka (et de la colère gaullienne contre le roi du Maroc) aux tensions avec les Américains et jusqu’à la manifestation du 17 octobre 1961 citée au détour d’un dialogue.
Le dessin est, lui aussi, forcément moins ample et spectaculaire. Il privilégie donc les petites cases et ajoute des cartels de présentation des personnages secondaires, pas forcément tous facilement identifiables, avec un dessin réaliste assez classique – au-delà du général, toujours aussi bien saisi, notamment dans son vieillissement. On retiendra cependant le final, crépusculaire mais assez grandiose, avec un dessin pleine page de De Gaulle, solitaire, en Irlande en 1969 et un épilogue avec les mots d’André Malraux, extraits des Chênes qu’on abat: “Le dernier grand homme qu’ait hanté la France est seule avec elle: agonie, transfiguration ou chimère… La nuit tombe.”
Néanmoins, malgré ce volume logiquement en retrait, cette trilogie rend bien compte de la vie et du rôle de Charles de Gaulle, qui avait incontestablement sa place au sein de cette collection des “hommes qui ont fait l’Histoire”. Et qui plus est, forcément, en ce cinquantième anniversaire de sa mort.